Neuf. C’est le nombre de mes enfants inconnus, à ce jour. De ces enfants que je ne connaîtrais jamais sauf auprès de Dieu, si, comme je me plais à le croire, ils sont auprès de Lui. Je les connais tellement peu : je ne sais même pas si ce sont des garçons ou des filles !

M’aiment-ils ? Je ne sais pas, je ne pense pas, mais moi, je les aime, ces petits chéris, à un point que nul ne peut imaginer… Ils me manquent, tous, tellement. Trois d’entre eux n’auront jamais visité le ventre de leur maman et ils sont morts, sur une paillasse de laboratoire parce qu’on considérait qu’ils n’étaient pas assez forts pour nous « attendre » en passant par la congélation et la décongélation ; cinq autres n’y ont fait qu’un petit tour mais ne s’y sont pas nidés et pourtant, je les ai portés… et enfin, mon petit amour, si fort, qui avait réussi à s’installer dans sa maman, mais qui est parti un jour d’été, en plein mois d’août, parce que mon corps n’a pas pu le garder pour des raisons que l’on ignore encore aujourd’hui.

Vous me manquez, mes bébés, terriblement et atrocement… Votre grand-mère me dit que c’est parce qu’aucun autre n’est encore venu vous remplacer et que, quand je tiendrai votre petit frère ou votre petit sœur dans mes bras, la blessure sera moins douloureuse et sans-doute a-t-elle raison, mais je ne vous oublierai jamais, je vous le promets.

Qu’on ne me dise surtout pas que vous n’étiez rien, que vous n’étiez que des amas de cellules ; non, vous étiez et vous êtes mes enfants !

Une question m’obsède : pourquoi ? Et bien sûr, je n’ai pas de réponse, sauf pour les trois abandonnés.

La culpabilité est un sentiment très étrange. Pour ceux que l’on n’a pas transféré, je devrai m’en vouloir de vous avoir « tués » ou laissés mourir et pourtant, je me sais pardonner de Dieu et même si j’ai méprisé votre petite (toute petite) vie, un vrai poids a quitté mes épaules quand j’ai demandé pardon. A l’inverse, pour ces cinq petits êtres qui ne sont pas accrochés et mon petit amour qui m’a quitté à 4 ou 5 semaines de grossesse, je m’en veux terriblement comme si c’était ma faute parce que je n’ai pas su les garder, ce qui, avouons-le, raisonnablement n’est pas défendable. Mais qu’y faire ?

Ariane Brian

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